La réponse de Bercy à la députée Chantal Brunel, le 23 février, incite à la prudence sur les dons manuels. Jusqu’en 1999, en effet, l’administration affichait la même position, tant sur le plan civil que fiscal. Par exemple, si les parents de deux enfants faisaient un don manuel à l’un d’eux, il fallait tenir compte de l’utilisation des fonds pour rétablir l’égalité entre héritiers lors de la succession.
Fiscalement, le don manuel était soumis aux droits de succession à cette même valeur. Mais la position du fisc a évolué, du fait d’une mauvaise interprétation d’un arrêt de la Cour de cassation du 20 octobre 1998. Depuis le commentaire fait par l’administration sur cet arrêt, le don manuel est soumis aux droits de donation, juste à hauteur de sa valeur nominale… alors que civilement il est rapporté à la succession, à sa valeur au moment du décès.
La question de la députée portait sur la bizarrerie de cette distorsion : la réponse ministérielle n’a fait que la confirmer. Il y a là une hérésie fiscale. Il n’y aura plus aucune réévaluation, en termes fiscaux, des biens donnés manuellement, d’où un grave manque à gagner pour l’administration. Les contribuables sont en effet incités à ne plus formaliser leurs dons afin de ne payer des droits de succession que sur une valeur ancienne. Pour le contribuable, l’avantage n’est qu’apparent par rapport à une donation formalisée. Gare, en effet, aux désastres en termes civils et aux disputes en famille lors des successions.
Article paru dans « Challenges » le 18 mars 2010
Le choix du placement qui accueillera des actifs financiers faisant l’objet d’un démembrement est essentiel et la fiscalité n’est pas le seul critère à considérer.
« Pour les parents, laisser un héritage à ses enfants consiste à arbitrer entre consommation personnelle et transmission familiale », estiment Jérôme Bernecoli et Frédéric Poilpré. Dans une chronique du Point publiée le 20 mai, Julien Damon propose de taxer les héritiers plutôt que l’héritage au soutien de la thèse selon laquelle il est économiquement plus avantageux d’hériter que de travailler, oubliant que les Français sont majoritairement contre l’impôt sur la mort.
Aux termes de notre législation fiscale, chaque parent peut donner – en sommes d’argent, biens (meubles, voiture, bijoux, etc.), immeubles, ou valeurs mobilières (actions, parts sociales, etc.) – jusqu’à 100.000 euros par enfant sans qu’il y ait de droits de donation à régler. Ainsi, un couple peut-il transmettre à chacun de ses enfants 200.000 euros exonérés de droits tous les quinze ans.