Article paru dans Challenges le 19/05/2016
Des récentes jurisprudences illustrent ce principe essentiel dans une démocratie.
Les faits sont les suivants : à la suite d’une mutation professionnelle, des contribuables vendent, vingt-sept mois après leur déménagement effectif, leur résidence principale. L’administration fiscale, quelques mois après la vente, considère que le délai écoulé entre le déménagement et la vente serait trop long. Elle refuse d’admettre l’exonération des plus-values réalisées pour cession d’une résidence principale.
Le tribunal administratif de Versailles puis la cour d’appel de Versailles valident la position de l’administration. Les contribuables sont condamnés à payer l’impôt sur les plus-values dû et, pour régler cette somme, sont dans l’obligation de vendre leur nouvelle résidence principale.
Néanmoins, bien conseillés, ils saisissent le Conseil d’Etat, qui annule l’imposition fiscale. L’Etat est condamné à rembourser l’impôt payé à tort. Les contribuables, ayant subi un préjudice financier et moral avec dix ans de procédure et la vente de leur nouvelle résidence principale, demandent des dommages et intérêts. L’Etat a été condamné en décembre 2015 par le tribunal administratif de Besançon à leur verser 110000 euros à titre de dédommagement. Cette décision est satisfaisante. On peut néanmoins se demander quelles justifications on peut trouver à un tel acharnement contre un contribuable. Ce sont de telles attitudes qui amènent le peuple à désespérer de l’Etat. Et quand le peuple n’a plus d’estime pour le pouvoir régalien, la révolte est proche.
Dans une tribune, des fiscalistes membres du Cercle des fiscalistes plaident pour une réforme d’ampleur de la solidarité fiscale. Ils interpellent la ministre chargée de l’égalité entre les hommes et les femmes. En l’occurrence, ce portefeuille est désormais détenu par Aurore Bergé.
Le fisc est fondé à établir l’impôt éludé en remontant à la période de dix ans qui précède la découverte de l’irrégularité. Ainsi, il arrive que l’ex-conjoint soit mis en cause longtemps après les prononcés de la séparation et du divorce, explique un collectif de fiscalistes, dans une tribune au « Monde ».
Par deux décisions très attendues, la Cour de cassation se prononce sur le cumul des répressions fiscale et pénale après que la CJUE a jugé en 2022 la jurisprudence constitutionnelle incompatible avec la Charte des droits fondamentaux. Une réforme législative d’ampleur s’impose pour donner corps aux exigences issues de ces décisions.