Article paru dans Le Figaro le 6 avril 2018
Alors qu’un début de contestation fiscale se lève en France, Bernard Monassier* et Frédéric Douet* proposent au président de la République une vraie révolution fiscale par la mise en place d’une flat-tax à trois taux constants.
Une contestation fiscale est en train de s’établir en France. Les retraités tout d’abord voient leurs retraites diminuer par suite de l’augmentation de la CSG. Demain, les propriétaires fonciers vont constater que leurs revenus vont également diminuer pour la même raison. Enfin, dans un troisième temps, ce sera le tour des salariés.
Une telle contestation est dangereuse pour la République. Les Français sont amateurs de jacqueries qui ont parfois débouché sur de véritables révolutions. Le président de la République a la possibilité historique de faire une révolution fiscale pour anticiper cette révolte.
Pour cela, il faudrait supprimer l’impôt sur le revenu et l’intégrer de fait à la CSG. La fusion de l’IR, de la CSG et de la CRDS donnerait naissance à la contribution fiscale généralisée (CFG). Il s’agirait d’une flat-tax à trois taux constants dès le premier euro avec un système de décote pour éviter les effets de seuil: 0 % pour les revenus inférieurs à 1900 € par mois, 12 % pour les revenus compris entre 1900 et 5000 € par mois et 25 ou 30 % pour les revenus supérieurs à 5000 € par mois.
Tout d’abord, la CFG ferait échapper à tout prélèvement sur leurs revenus les vingt-deux millions de Français ayant un revenu brut mensuel inférieur à 1900 €. Dix-huit millions de contribuables seraient concernés par la tranche à 12 % et cinq millions par celle à 25 ou 30%. Le coût annuel de l’exonération de vingt-deux millions de contribuables serait de 4 milliards d’euros. Mais la CFG redonnerait du pouvoir d’achat à l’ensemble des Français, dopant ainsi la consommation et, en définitive, les recettes en termes de TVA et d’impôt sur les bénéfices.
La CFG permettrait la suppression de l’ensemble des niches fiscales. Leur coût est évalué à 33,6 milliards d’euros pour 2018, dont 12,7 milliards pour les crédits et réductions d’impôt
En revanche, leur efficacité est discutable. Le législateur a poussé la schizophrénie jusqu’à redonner du pouvoir d’achat aux contribuables sous forme de crédits et de réductions d’impôts et, dans le même temps, à plafonner à 10.000 € par an le total de l’avantage fiscal procuré par la plupart des niches fiscales. Leur suppression rendrait de la lisibilité à notre système fiscal et l’économie réalisée par l’État ferait que les recettes de la CFG avoisineraient celles de l’IR et de la CSG.
Réconcilier les Français avec l’impôt
Enfin, le fait d’asseoir la CFG sur le revenu brut et de supprimer les niches fiscales limiterait les risques de fraude et d’évasion tout en permettant un vrai prélèvement à la source, y compris pour les revenus fonciers, et non tel que cela est actuellement prévu, ce qui s’avère n’être en définitive qu’une mensualisation obligatoire pour tous de l’IR.
Moins de contrôles, des recettes plus fluides, telle serait la solution de cette flat-tax généralisée. C’est le seul moyen de réconcilier les Français avec l’impôt ; situation d’ailleurs paradoxale puisqu’ils contestent l’impôt sur le revenu alors que plus de 50 % d’entre eux ne le paient pas.
Frédéric DOUET est professeur à l’université Rouen-Normandie.
Bernard MONASSIER est président de BM Family Office et vice-président du Cercle des fiscalistes. Il est administrateur de Dassault Médias.
Depuis la nuit du 4 août et l’abolition des privilèges, l’égalité devant l’impôt demeure au cœur de notre vie publique. Selon les derniers travaux de l’Insee, avant transferts, les ménages aisés (10 % de la population) ont un revenu 18 fois plus élevé que celui des ménages pauvres, contre 1 à 3 fois après transferts…
Une récente étude de l’Institut des politiques publiques nous apprend que les 0,1 % des Français les plus riches, les 378 foyers fiscaux versant les plus fortes contributions, seraient imposés sur leurs revenus au taux dérisoire de 2 %. Estimation surprenante, étant donné que le taux de l’impôt progressif culmine à 49 % dans la catégorie visée.
L’Assemblée Nationale a récemment adopté un amendement au projet de loi de finances pour 2023 visant à relever de 30 à 35% l’imposition des dividendes perçus par les particuliers lorsqu’ils dépassent de 20% la moyenne de ceux versés au cours des cinq dernières années et proviennent d’une société réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros.
Merci à toutes et à tous ayant suivi la nouvelle édition des Rencontres de l’Épargne organisée par Le Monde, en partenariat avec BoursoBank, lors de laquelle Philippe Bruneau, Président du Cercle des Fiscalistes, est intervenu.
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