Dans son projet de réforme de la fiscalité du patrimoine, le gouvernement a décidé d’augmenter la contribution des non-résidents aux charges de la collectivité. C’est dans cette optique qu’il souhaite taxer les étrangers installés en France mais aussi les nationaux français partis s’établir à l’étranger.
Dans le premier cas, le gouvernement envisage de créer une taxe spéciale de 20% sur la valeur cadastrale des résidences secondaires détenues par des non-résidents en France. Fort heureusement, les nationaux français expatriés pouvant justifier qu’ils ont résidé au moins trois ans en France dans les dix ans précédant leur expatriation seront temporairement exonérés. En outre, le projet de loi entend s’attaquer aux montages initiés par des non-résidents visant à réduire leur ISF sur les biens immobiliers qu’ils détiennent en France. Ces biens sont souvent détenus par des sociétés civiles ayant un capital faible et un compte courant important. Et à ce jour, c’est la valeur nette des parts qui est retenue pour l’évaluation au titre de l’ISF. A partir de 2012, l’évaluation se fera sans tenir compte du passif de la société.
Le second cas constitue la mesure la plus emblématique du projet. Elle vise à réintroduire en France une « exit tax » proche de celle qui a déjà été sanctionnée en 2004 par la CJCE, et dont le but est de taxer les français qui ont pourtant légalement quitté la France. Pour ce faire, le législateur propose un texte de 40 alinéas, une usine à gaz totalement incompréhensible et difficilement applicable. A partir du 3 mars 2011, la plus-value sur titres constatée lors du transfert de domicile fiscal hors de France, et dès lors que ces titres représentent plus de 1 % du capital ou 1,3 million d’euros, sera soumise à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux (31,3%) si ils sont cédés dans les huit ans suivant la sortie du territoire national.
Le cumul des deux mesures visant directement les non-résidents aura pour conséquence un alourdissement significatif de leur imposition en France. Quant à l’ « exit tax », elle n’a aucune chance de survie à moyen terme. Contraire au droit communautaire comme aux conventions fiscales signées par la France avec de nombreux pays, elle passera sous les fourches caudines du Conseil d’Etat ou de la CJCE. Son seul intérêt est de gagner du temps en attendant l’inévitable sentence.
Directeur Clientèle Privée et Entreprises
Banque Neuflize OBC
Président Fondateur du Cercle des fiscalistes
Source : Article paru dans « Le Monde » du 29 juin 2011